Contexte et enjeux du projet de recours collectif en Suisse

Le gouvernement fédéral avait proposé un projet visant à instaurer un dispositif permettant d’engager des actions de groupe, suite à une motion adoptée en 2014 par le Parlement. L’objectif était de faciliter la représentation collective des personnes lésées dans les cas de dommages dispersés ou de préjudices subis de manière aléatoire. Cependant, face aux critiques et à la nécessité de simplifier la proposition, les dispositions ont été considérablement modifiées. La version finale présentée par le gouvernement n’a pas rencontré davantage de soutien.

Le fonctionnement actuel et les limites du système judiciaire suisse

Dans le contexte actuel, chaque individu doit intenter une action juridique séparée pour faire valoir ses droits devant les tribunaux, ce qui peut dissuader de nombreux plaignants en raison de la complexité et du coût de la procédure. Le projet de loi visait à remédier à cette difficulté en permettant aux organisations, sous certaines conditions, d’engager des recours collectifs à l’encontre d’entités illicites. Ces organisations devaient notamment être à but non lucratif et exister depuis au moins douze mois pour pouvoir exercer cette nouvelle faculté.

Interrogations économiques et crainte de distorsion de marché

Selon le conseiller aux États Beat Rieder (Centre/VS), le cadre juridique actuel suffirait à traiter la majorité des cas, et une facilitation des actions groupées pourrait comporter des risques pour l’économie. Il évoque notamment une possible augmentation des coûts pour les acteurs économiques, sans que les bénéfices pour les consommateurs soient clairement établis. En revanche, certains députés, dont Fabien Fivaz (Vert-e-s/NE), considèrent que cette crainte serait exagérée, soulignant que seules les organisations à but non lucratif pourraient utiliser cet outil.

Refus du Parlement et ses implications

Le Conseil national a décidé de ne pas examiner en détail le projet d’action collective, qualifié par ses opposants de « minimal » et de peu efficace. Le député Carlo Sommaruga (PS/GE) a rappelé que, malgré la vulnérabilité des consommateurs face à des situations comme le scandale du Dieselgate, le droit suisse ne permet pas encore une action collective généralisée, contrairement à certains autres pays européens. La loi qui pourrait faciliter ces recours est ainsi repoussée, ce qui pourrait entraîner une augmentation du « tourisme judiciaire », selon l’Alliance des organisations de consommateurs.

Réaction des associations et perspectives

Les associations de consommateurs déplorent cette décision, la qualifiant de « déni de justice » à grande échelle, et dénoncent le fait que la volonté de simplifier la procédure n’ait pas été suffisante pour faire évoluer le cadre juridique. Elles évoquent également une augmentation potentielle du recours à la justice en Europe, avec l’exemple des hôteliers suisses ayant rejoint une action collective contre Booking.com aux Pays-Bas. Le débat reste ouvert sur la nécessité de renforcer la législation en matière de recours collectifs, afin de garantir une justice plus accessible pour tous.

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