Un dilemme complexe pour l’Europe face au conflit ukrainien

Mariya Gabriel, ancienne commissaire européenne, ex-ministre des Affaires étrangères de Bulgarie et présidente actuelle de l’Institut Robert Schuman pour l’Europe en Bulgarie, analyse la situation politique que traverse l’Europe dans le contexte de la guerre en Ukraine. Selon elle, l’Union européenne est confrontée à un choix majeur : soit les États membres agissent de manière autonome, ce qui soulève des interrogations sur la nature du soutien et les ressources disponibles, soit ils continuent de s’appuyer sur les garanties de sécurité offertes par les États-Unis.

Cette double perspective met en lumière les enjeux de cohésion entre les pays membres. Mariya Gabriel souligne que certains États accordent une importance considérable à l’appui américain, mais questionne les limites des compromis susceptibles d’affaiblir la position européenne dans son ensemble.

Leadership et perspectives de paix : un préalable indispensable

« Tant qu’un leadership disposant des moyens nécessaires n’émerge pas, il semble illusoire d’envisager une paix durable », affirme la présidente de l’Institut Robert Schuman. Pour elle, un préalable indispensable à toute résolution est l’établissement d’un cessez-le-feu. Ce constat souligne la nécessité de renforcer les capacités politiques et stratégiques européennes pour promouvoir une réponse coordonnée à la crise.

Sanctions et soutien militaire : quels enjeux pour l’Europe ?

Alors que Donald Trump évoque la mise en place d’une deuxième phase de sanctions contre la Russie, Mariya Gabriel rappelle que des mesures coercitives sont déjà en vigueur. Elle insiste sur l’importance de comprendre pourquoi ces sanctions n’ont pas produit l’impact escompté, en s’intéressant notamment aux mécanismes de contournement et à l’utilisation de fonds gelés.

Concernant l’éventuel déploiement de forces militaires en Ukraine, elle affirme que le message en faveur de l’envoi de troupes est clair mais pose plusieurs questions fondamentales : la nature de l’engagement, les moyens mobilisés et les objectifs poursuivis. Elle met également en avant la nécessité de prendre en compte les décisions des parlements nationaux dans ces choix.

Un déplacement du centre politique vers l’Est de l’Europe

Pour Mariya Gabriel, le conflit ukrainien a modifié le « centre de gravité politique », désormais tourné vers l’Est. Cependant, elle nuance en précisant que l’Europe de l’Est ne constitue pas un bloc homogène. Chaque pays interprète la guerre de manière différenciée : la Pologne perçoit avant tout une question de sécurité nationale, les pays baltes s’identifient fortement au conflit, tandis que la Bulgarie affirme son attachement à l’Union européenne et à l’OTAN, sans renier son passé historique.

La Bulgarie face aux tensions internes et à la Russie

Mariya Gabriel mentionne une certaine « crise d’identité politique » au sein de la société bulgare, marquée par l’émergence de discours anti-européens qui exploitent un sentiment de marginalisation chez certains citoyens. Ces propos trouvent un écho, en partie alimenté par des groupes nostalgiques et une population vulnérable à la désinformation ou affectée par des difficultés économiques.

Le soutien occasionnel du président bulgare à Vladimir Poutine est aussi mis en perspective par la diplomate, qui estime que ces dynamiques politiques ne sont pas évitables. Elle reconnaît que la Russie pourrait conserver une influence en Bulgarie mais y voit une raison d’affirmer une position ferme dans la défense des intérêts européens.

Contexte récent : attaques en Ukraine et renforcement de la sécurité

Dans ce contexte de tensions, Kiev a récemment été la cible d’une attaque menée par des drones russes, qui a endommagé un bâtiment gouvernemental. Ce nouvel événement souligne l’importance de la vigilance et du renforcement des réponses internationales dans cette région sensible.

Adaptation web par Julie Liardet, interview radio de Pietro Bugnon

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